Nicolas Ledoux construisit une soixantaine de barrières.
Si au début de la révolution "le mur murant Paris" fut détruit par endroits, il fut bien vite rétabli et l'enceinte durera jusqu'en 1860 date à laquelle Paris s'étendra jusqu'aux fortifs de Thiers .
Le mur avait 23 kilomètres de long, une hauteur de 3,2 mètres, un fossé de 12m et une interdiction de construire sur une zone de 100m. Il n'avait aucune fonction militaire: il servait seulement à empêcher la contrebande.
Le vin moins cher "hors barrières" fera la fortune des guinguettes installées sur les flancs des hauteurs bucoliques du village de Belleville. D'innombrables débits de boisson fleuriront le long de la rue de Belleville, de la rue de Ménilmontant et de la rue des Couronnes.
Quand le mur est construit La Villette et Belleville sont des villages campagnards de 2000 habitants où les parisiens vont le dimanche, lorsqu'il est détruit ce sont des quartiers ouvriers de plus de 50 000 habitants.
Après 1860 la démolition du mur permettra d'ouvrir les boulevards extérieurs, puis sur le même tracé, les lignes 2 et 6, partiellement aériennes, du métro.
Nous nous intéresserons à la portion du coté des Buttes Chaumont et de Belleville, c'est à dire une partie de la 5ème section, de la barrière de la Villette à celle de Ménilmontant.
Barrières de la Villette (Senlis et Pantin)
La barrière de Senlis ( dit aussi de la Villette (1) ou de Saint Martin) donnait sur le chemin du Bourget (l'avenue de Flandre) et la barrière de Pantin sur le grand chemin de Meaux (l'avenue Jean Jaurès) avec entre elles d'eux la rotonde Saint Martin qui subsiste.
On entrait dans Paris par des grilles de 4,2 m de large flanquées de deux pavillons
La rotonde de St Martin servait de bureau et de corps de garde.
"La barrière de Saint-Martin , remarquable par ses formes pittoresques, semble plutôt convenir à un temple qu'à un bureau de percepteurs des droits d'entrée. Cette barrière se trouve sur la ligne de l'axe du bassin de la Villette , et l'observateur , qui se place à l'extrémité de ce bassin, voit cette riche perspective heureusement terminée par ce pompeux édifice." (J A Dulaure 1859)
La rue de Flandre était une ancienne voie romaine, c'était la principale rue du village de la Villette. L'autre rue importante du village était l'avenue Jean Jaurès, route d'Allemagne, qu'emprunta Louis XVI lors de sa fuite et en sens inverse les alliés quand ils envahirent Paris en 1814 ( la reddition fut signée dans un cabaret tout à coté: "le petit jardinet").
Notons que les noms des routes qui quittent Paris désignent des destinations de plus en plus lointaines au fur et à mesure que les transports progressent, ainsi l'avenue Jean Jaurès se nommera successivement, chemin de Bondy, grand chemin de Meaux, route de Strasbourg, puis route d'Allemagne.
En 1808 fut créé le bassin de la Villette qui apportait l'eau de l'Ourq, puis le canal St Martin en 1825.
Le bassin de la Villette connait alors un trafic considérable, les 2/3 des marchandises qui arrivent par voie d'eau à Paris transitent ici. Les bords du bassin se couvrent de cheminées d'usines.
Après 1860 la rotonde sera convertie en silo à sel et sera incendiée sous la commune. Elle subit un nouvel incendie en 1935 alors que l'on venait de la dégager de bâtiments parasites. Elle aura ensuite pour voisine la gare Citroën des cars. Restée longtemps sans affectation, elle recevra un dépôt archéologique avant d'être transformée récemment pour accueillir un restaurant.
1 ) sous le Directoire par l’arrêté du 24 thermidor an VIII
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La rotonde coincée entre le métro aérien et les bâtiments des messageries fluviales | Depuis les années 30 les bâtiments des messageries ont fait place à la gare des cars Citroën qui ne disparaîtra qu'en 1985 En 1978 la commission du vieux Paris s'installe dans la rotonde et publie "les cahiers de la Rotonde" |
Barrières St Louis ( boyauderie et combat)
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Le nom de la boyauderie provenait d'une "corderie à boyaux" situé sur la rue de Meaux qui conduisait alors à la voirie de Montfaucon.
Le "combat" était celui d'animaux ( taureaux, chiens, ours) , spectacle qui se déroulera jusqu'en 1830 à cet endroit.
C'est aujourd'hui la place du colonel Fabien avec le siège du parti communiste
La barrière du Combat après ceux de la Commune |
Barrière de la chopinette
Elle menait vers la butte Chaumont sur laquelle poussait des vignes et des guinguettes et se trouvait le moulin de la chopinette.
On y accédait du coté de Paris par la rue de la Chopinette ( rue de Sambre et Meuse) ou celle du Buisson St Louis. Au delà, rue Saint laurent ( rue Rebeval), il y avait des guinguettes " le rendez vous des bons lurons", le vin sans O".
Un chemin, dont l'amorce est l'actuel passage Gauthier, montait au moulin de la chopinette (à l'angle des rues Fessart et Preault) devenu lui même une guinguette active jusque vers 1850 sous le nom de "moulin de la galette" (comme à Montmartre).
Un chemin, dont l'amorce est l'actuel passage Gauthier, montait au moulin de la chopinette (à l'angle des rues Fessart et Preault) devenu lui même une guinguette active jusque vers 1850 sous le nom de "moulin de la galette" (comme à Montmartre).
Le sol étant riche en carrières souterraines c'était aussi un lieu de trafic (la contrebande par les tunnels à Gaza n'a rien d'une invention récente)
Le bâtiment assez imposant ( voir le plan plus bas ) comportait deux loggias circulaires supportées par 5 colonnes.
Le bâtiment assez imposant ( voir le plan plus bas ) comportait deux loggias circulaires supportées par 5 colonnes.
Barrière de Belleville
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La paisible barrière de Belleville |
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La descente de la Courtille avec la barrière en arrière plan |
Citons surtout le Grand St Martin, cabaret du père Desnoyez, ( qui deviendra les Folies Belleville) et le bal Favié.
"Entrez, messieurs, entrez, mesdames, au Grand- Vainqueur, à la Fontaine-de-Ricey, aux Barreaux-Verts, au Petit-Bacchus, chez Fanchon-la-Vielleuse, au Jardin de-Flore, chez Dormois, chez Maréchaux, chez Grand-Jean, ou entrez chez Desnoyez, entrez au Petit-Ramponneau, entrez encore ailleurs et puis partout; trombones, octavins, grosses-caisses vous invitent, vous n'avez que l'embarras du choix " (Le nouveau conducteur dans Paris...1851)
C'est au sortir des bals Favié et du père Desnoyez que commençait vers 1830 dans la nuit du mardi gras la fameuse descente de la Courtille dont le héros était Milord l'Arsouille. Cette nuit là les moins fortunés allaient se restaurer et boire à la Vielleuse, au pot Brun ou au grand Vainqueur alors que les plus huppés fréquentaient le Point du Jour, la Pèlerine ou le père Desnoyez. On dansait au bal Favié ou aux Folies Belleville.
Ensuite chacun, déguisé suivant ses moyens, allait à pied ou en voiture jusqu'au Cours la Reine par le faubourg du Temple, la place du Château d'eau ( la République) et les boulevards.
Sous la restauration les cabarets de Belleville furent aussi les lieux de rassemblement de sociétés chantantes : les goguettes.
"Entrez, messieurs, entrez, mesdames, au Grand- Vainqueur, à la Fontaine-de-Ricey, aux Barreaux-Verts, au Petit-Bacchus, chez Fanchon-la-Vielleuse, au Jardin de-Flore, chez Dormois, chez Maréchaux, chez Grand-Jean, ou entrez chez Desnoyez, entrez au Petit-Ramponneau, entrez encore ailleurs et puis partout; trombones, octavins, grosses-caisses vous invitent, vous n'avez que l'embarras du choix " (Le nouveau conducteur dans Paris...1851)
C'est au sortir des bals Favié et du père Desnoyez que commençait vers 1830 dans la nuit du mardi gras la fameuse descente de la Courtille dont le héros était Milord l'Arsouille. Cette nuit là les moins fortunés allaient se restaurer et boire à la Vielleuse, au pot Brun ou au grand Vainqueur alors que les plus huppés fréquentaient le Point du Jour, la Pèlerine ou le père Desnoyez. On dansait au bal Favié ou aux Folies Belleville.
Ensuite chacun, déguisé suivant ses moyens, allait à pied ou en voiture jusqu'au Cours la Reine par le faubourg du Temple, la place du Château d'eau ( la République) et les boulevards.
Sous la restauration les cabarets de Belleville furent aussi les lieux de rassemblement de sociétés chantantes : les goguettes.
Barrière de Ramponneau
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Cette célèbre gravure montre le triomphe de Ramponneau dont on ne peut même plus approcher le cabaret |
Le vin y était bon marché:
Vive le vin de Ramponneau,
C'est du nectar en perce.
Après la disparition du cabaret elle s'appela officiellement barrière de Riom puis barrière de l'Oreillon.
Sur les cartes le bâtiment de l'octroi semble minuscule, il n'en existe probablement pas de gravure.
Barrière de 3 couronnes

Il y eut là sous la restauration le "jardin des montagnes françaises", lieu de plaisir le dimanche ou des chariots dévalaient une butte, ou l'on dansait et assistait aux feux d'artifices.
Il y eu aussi des guinguettes rue des couronnes comme "l'Elysée Ménilmontant", "l'Ancienne héroïne Française", le "bal du Delta" ou le "Jardin des Alcides"
La rue des 3 couronnes s'appelle aujourd'hui Jean Pierre Timbaud.
Le bâtiment d'octroi avait la forme d'une croix grecque
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Les montagnes Françaises créées en 1817. Il y avait aussi dans le jardin des balançoires, des jeux divers et un bal. Ce type de jardin de plaisir avec des montagnes russes eu une grande vogue au début de la restauration, il y avait deux établissements concurrents à Paris: Tivoli ( Saint Lazare) et le jardin Beaujon ( place des Ternes) En 1850 tout avait disparu pour faire place à des maisons, il ne restait que la piste du bal du Delta . |
Barrière de Ménilmontant
La rue de Ménilmontant était une route bordée d'arbres qui butait, du coté de la campagne, sur le parc du château des Pelletier de St Fargeau
C'était un lieu de promenade avec des jardins le long duquel s'élevèrent des guinguettes comme "le galant jardinier" ou "la barque à Caron", "le Grand Orient", "le rendez vous des pompiers", "les Lilas", "le paon d'or" , "le Grand Saint Eloi".
En 1832 Ménilmontant fut la Rome des Saint Simoniens sous la direction d'enfantin et Bazard.
C'était un lieu de promenade avec des jardins le long duquel s'élevèrent des guinguettes comme "le galant jardinier" ou "la barque à Caron", "le Grand Orient", "le rendez vous des pompiers", "les Lilas", "le paon d'or" , "le Grand Saint Eloi".
En 1832 Ménilmontant fut la Rome des Saint Simoniens sous la direction d'enfantin et Bazard.
La barrière était entouré de deux bâtimentscarrée avec 32 colonnes dont l'un ne fut probablement jamais terminé.
Les pavillons d'octroi de Ledoux
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Plan et élévation de la barrière de la chopinette |
Ledoux était l'architecte des fermiers généraux et il avait déjà réalisé la saline d'Arc-et-Senans.
Ledoux voulait faire beau et grand et il nomma son oeuvre les "prophylées de Paris".
Les fermiers généraux s’inquiétèrent surtout des dépenses excessives de leur architecte
En 1787 Ledoux fut remercié alors que l'enceinte méridionale et ses 17 barrières était achevée et que l'enceinte septentrionale avec ses 38 barrières était encore en construction. C'est l'architecte Jacques Denis Antoine qui fut chargé de terminer les constructions.
Les pavillons sont des compositions d'éléments simples - cube, rotonds, croix grecque - associés à un péristyle, des colonnades ou des loggias
Ledoux veut que la forme réponde à la fonction, c'est de l'antique revisité , du néo-classique issu de l'esprit des lumières.
Le mur murant Paris était évidemment impopulaire et l'architecture des barrières fut très vite jugée sévèrement.
"On en voit qui ressemble à des cavernes, à des tombeaux; les unes à des églises, d'autres qui ont la magnificence des palais. L'architecte a prodigué ses dessins fantasques. C'était la ferme qui donnait l'or et la ville qui épanchait ses sarcasmes. ( Mercier 1800)
"L'architecte Ledoux , en voulant donner des preuves de la fécondité de son imagination, n'en a souvent prouvé que les écarts. Le luxe qu'il a prodigué dans ces productions architecturales blesse toutes les convenances ; on voyait avec mécontentement et murmures de fastueux édifices consacrés à une perception oppressive pour toutes les classes de la société, et très gênante pour le commerce. C'était blanchir les sépulcres, faire admirer les instruments de l'oppression." (Dulaure)
"Les barrières de Paris construites sur les plans de l'architecte Ledoux méritent peu de fixer l'attention : presque toutes sont des édifices sans goût, un lourd assemblage de pierres de taille bizarrement disposées, des bâtiments sans appropriation à la destination qu'on voulait leur donner. Rien de plus pitoyable que la fécondité prétentieuse qui ne sut produire qu'une si pauvre, si mesquine, si triviale variété." ( B. R. 1853)
Le fonctionnement de l'octroi
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La Bohème, la scène se passe à l'aube en février à la barrière d'Enfer |
En mai 1791 l'assemblée nationale abolit " tous les droits d'entrée dans les villes".
En 1794 la Convention décida que tous les bâtiments de l'octroi "seraient érigés en monuments publics et que le nom des tyrans y seraient inscrits en caractères de bronze" et on jeta Ledoux en prison.
On s'aperçut alors que la ville n'avait plus de ressources et le conseil des Cinq-Cents rétablit en 1798 un "octroi municipal de bienfaisance".
En 1804 le premier consul rétablit définitivement l'octroi. Quelques barrières furent incendiées lors des révolutions de 1830 et de 1848 mais on ne pouvait se priver d'un revenu qui s’élevait alors à plus de 33 millions avec un coût de perception de 2 millions (soit 6%).
L'octroi était essentiellement prélevé "sur les boissons, sur les alcools dénaturés pour leur emploi à l'éclairage ou dans les arts, sur les liquides, huiles, vinaigres, raisins, sur les viandes ou autres comestibles, sur les combustibles, sur les fourrages, les matériaux et bois de construction.
Les vins en bouteille, huile d'olive, pâtés, écrevisses, truites, saumons, turbots , esturgeons, huîtres, volailles fines, gibiers, dindes, oies, lapins, agneaux, chevreaux, cire blanche, bougie, etc., ont à peine produit dix-huit cent mille francs." (B. R. 1851)
La nuit les barrières sont fermées ainsi que l'on peut le constater à l'opéra au début de l'acte III de la Bohême qui se déroule à l'aube à la barrière d'Enfer ou attendent balayeurs, laitières et paysannes.
L'octroi était essentiellement prélevé "sur les boissons, sur les alcools dénaturés pour leur emploi à l'éclairage ou dans les arts, sur les liquides, huiles, vinaigres, raisins, sur les viandes ou autres comestibles, sur les combustibles, sur les fourrages, les matériaux et bois de construction.
Les vins en bouteille, huile d'olive, pâtés, écrevisses, truites, saumons, turbots , esturgeons, huîtres, volailles fines, gibiers, dindes, oies, lapins, agneaux, chevreaux, cire blanche, bougie, etc., ont à peine produit dix-huit cent mille francs." (B. R. 1851)
La nuit les barrières sont fermées ainsi que l'on peut le constater à l'opéra au début de l'acte III de la Bohême qui se déroule à l'aube à la barrière d'Enfer ou attendent balayeurs, laitières et paysannes.
Les barrières de Ledoux furent fermées en 1859 date à laquelle l'octroi est reporté aux fortifs de Thiers.
Sites et références


- Les fortifications de Paris. Le Halle
- Évocation du vieux Paris. Hillairet ( et autres ouvrages du même auteur)
- Histoire de Paris par B. R. chez Ruel ainé 1853
- Guide du promeneur aux barrières 1851
- Conducteur général de l'étranger à Paris 1847
- Le nouveau conducteur dans Paris et ses environs 1851
- Promenade à tous les bals publics... 1830
- Carte de Jodot. 1829
- Carte Hocquart 1831
- Gallica pour la majorité des vues des barrières
- L'architecture considérée sous le rapports de l'art.... Ledoux 1804
- Le nouveau Paris T 6 chap 254. Mercier 1800
- Les fortifications de Paris à travers les ages. Bertout de Solières 1906
- Three revolutionary architects. Kauffmann 1952
- Histoire de Paris T6. J A Dulaure 1859
- Ledoux et Paris. Cahiers de la Rotonde n°3 1979
- Sur les traces de Claude-Nicolas Ledoux. Ballades du patrimoine ( les décors du café militaire et de l’hôtel d'Uzès à Carnavalet et l’hôtel D'Halwyll rue Michel-Comte)
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