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lundi 7 octobre 2013

Du Grand St Martin aux Folies Belleville

descente de la courtille
La descente de la Courtille.
A droite la barrière de Belleville de Ledoux
au grand saint martin
Au Grand St Martin 
Au 8 rue de Belleville  se sont succédés une guinguette , un théâtre, un music-hall, un cinéma  et .. un supermarché.
Il y eu d'abord, sous la restauration, le Grand St Martin, la plus célèbre des guinguettes de la Courtille dirigée par les Dénoyez.
A la fin de L'Empire et sous la Commune ce fut le lieu des réunions politiques de Belleville. Ce fut ensuite un théâtre populaire, puis un music-hall ou débuta Piaf, Line Renault et bien d'autres. 
Ensuite ce ne fut plus qu'un cinéma de quartier et aujourd'hui un supermarché Dia. 

Les Desnoyez 

A la chute de l'Empire le mur des fermiers généraux est devenu  "étanche" pour les marchandises et la Courtille est nettement séparée entre la zone englobée dans Paris, où l'octroi augmente les prix, et  celle dépendant du village de Belleville.
Juste après les barrières d'octroi fleurissent des cabarets  dont le plus célèbre est le Grand Saint Martin situé au 8 de la rue de Paris (l'actuelle rue de Belleville)
Le Grand St Martin est un cabaret champêtre dont le patron s'appelle Desnoyez ( Desnoyé, Dénoyez) . Il va jouir de la même réputation qu'avait eu le tambour Royal de Ramponneau, rue St Maur, sous la régence.
Il y a un jardin et une énorme salle de restauration avec à l'étage des cabinets particuliers.
En 1830  un transfuge du Grand St Martin, Favié ( Favier), crée au 13 un établissement concurrent qu'il appelle d'abord Petit St Martin.
Au fond du jardin on crée un bal "les Folies Belleville".
Ce n'est que chez Desnoyez, 
Nos amis à la Courtille
Ce n'est que chez Desnoyez,
Que l'on peut bien danser.
Grand saint martin jardingrand saint martin salle
Une guinguette à Belleville, probablement le jardin du Grand St MartinLa cuisine se faisait dans la salle

aux folies belleville
Après 1860 les folies Belleville reconstruites  sont flanquées de 2 boutiques indépendantes de l’établissement. A gauche un café et à droite un charcutier 
Rochefort aux Folies Belleville
Rochefort à la tribune des Folies en 1869
Le théâtre de Belleville par E Carrière en 1895
Ouvert en 1817 au 46 rue de Belleville ce fut le principal rival -en temps que théâtre- des Folies Belleville.
Il y eut aussi, au 23, le "théâtre nouveau " à la brève existence de 1912 à 1919
Folies Belleville et funiculaire
Le funi de Belleville et à droite le théâtre populaire 
Folies belleville TNP
Le TNP aux folies en 1923
Folies Belleville girls
Les girls des folies dans les années 30 
Folies Belleville No No Nanette
No No Nanette de Vincent Youmans aux Folies vers 1930 
folies Belleville 1950
Le Music-hall dans les années 50 

La descente de la Courtille

Jusque vers 1860, l’événement de l'année se déroule dans  la nuit du mardi gras au  mercredi des cendres. C'est la descente de la Courtille  (1)ou vont se côtoyer toutes les classes sociales et tous les déguisements dans un millier de voitures avec des dizaine de milliers de personnes aux fenêtres
Dans la soirée le populaire allait à la Vielleuse, au Pot-Brun ou au Grand Vainqueur mais les rupins allaient au Point du jour, à la Pèlerine et surtout chez le père Desnoyers. C'était d'un coté vin, moules, pommes de terre frites et de l'autre  champagne, soles normandes et truffes.
On allait danser au Folies Belleville ou au bal Favié et quand l'aube arrivait tout le monde sortait des bals et des cabarets: la descente de la Courtille commençait, chacun déguisé selon ses moyens, à pied ou en voiture.

Les figures principales du carnaval furent Milord l'Arsouille, Rosita, Celeste Mogador. Il y avait des costumes propres à l’événement comme ceux de Chicard, Pritchard et Balochard
Il y eut deux milords l'Arsouille, le premier était Lord Seymour et le second  un riche parisien nommé La Battut . Les deux se sont fait connaitre par leurs excentricités et leur "générosité". Par exemple on    raconte que Lord Seymour   jetait des gâteaux  d'une fenêtre des Vendanges de Bourgogne, au coin du canal St Martin. A court de munitions il jeta des pièces de monnaie préalablement chauffées dans l'huile bouillante.
La fête durait jusqu'à sept heures du matin.

Les clubs rouges 

Le premier banquet communiste au monde eu lieu chez Desnoyez le 1er juillet 1840(2). Il réunissait plus de 1000 personnes.
Le coiffeur Rozier y pris la parole et porta un toast "à l'égale répartition des droits et des devoirs, c'est à dire à la communauté des travaux et des jouissances".

Sous le second Empire l'urbanisation progresse, le village de Belleville est intégré à Paris en 1860: c'est l’arrêt de mort des cabarets de la Courtille et il faut se reconvertir.
Les Dénoyez pensent développer  le bal et proposer des "revues"
Le jardin disparaît  et le bâtiment de la rue de Belleville est reconstruit vers 1860 avec pour enseigne "Le bal des  folies de Belleville".
On l’appellera encore quelques temps les Folies Desnoyez puis le nouveau nom s'imposera (3)
La rue Dénoyez est officiellement ouverte en 1863 reprenant  le tracé d'un chemin rural de Belleville

La salle des Folies contient 500 places et les Desnoyez (au contraire de Favier) acceptent qu'elle serve à des réunions politiques ou la tribune de l'orchestre devient celle des orateurs.
Vers 1869 Mathorel, Flourens, Vermorel , Gambetta ,Vallès, Rochefort y prendront la parole.
Le programme de Belleville y est discuté et Gambetta accepte en Mai 1869 d'être désigné comme candidat à la députation.
Durant la commune les réunions de clubs se multiplient aux Folies (4).

Le théâtre populaire

Après la Commune les Folies gardent une réputation sulfureuse et en 1878  on arrête le directeur Dubroni et l'administrateur soupçonnés de recel.
Ensuite sous la direction de M Cassonnet les folies alternent revues et théâtre . En matière de théâtre il  s'agit de pièces courtes proches de la farce.
Il y a un peu plus haut dans la rue un autre théâtre- le théâtre de Belleville, créé sous la restauration -  dont le répertoire a un peu plus de tenue.(5)
Par exemple en on donne aux Folies dans le mois de février  1887: Une partie de rigolade, Mon gendre, la perle d'isigny, Un mariage avant le divorce, une nuit de Mardi-Gras alors que le théâtre de Belleville ,plus sérieux, donne Le maitre de Forges, Jacques Bonhomme, La sorcière ou les états de Blois, les cinq doigts de Birouk.
La salle  est réaménagée en 1893 pour accueillir 800 spectateurs. et les Folies Belleville ajoutent "théâtre populaire" à leur nom . Le directeur Eugéne Berny n'était pas un précurseur de Jean Villar, il s'agissait simplement d'affirmer que les spectacles étaient "accessibles" à tous. 

Le music-hall après 14

Le théâtre est racheté par Oscar Dufrenne qui possédait d'autres établissements dont un à Deauville.
On donne des opérettes, des revues et des pièces de théâtre toujours très populaires.
On y entend Montehus, Bérard, Damia, Mayol, Frehel ou Gaby Montbreuse.

Le théâtre national populaire ( le vrai)  fondé par Firmin Gémier en 1920 donne ordinairement ses spectacles dans la salle de l'ancien Trocadéro mais tente d'aller dans un quartier populaire en emmenant la  troupe de l'Odéon aux Folies Belleville en 1923 On y jouera  la guerre des barques et  les fleurs du vase.

Dans les années 30 apparaissent des séances de boxe et les Folies  sont à nouveau le lieu de  réunions publiques. Les pièces de théâtre cèdent presque complètement  la place au music-hall.. Ce sera Jean Lumière, Berthe Sylva, Léon Raiter, Maurice Chevalier, Georgius  ou Eugénie Buffet.

Pendant l'Occupation, à partir de 1941, le lieu est beaucoup fréquenté par les soldats allemands. On   y voit Gaston Ouvrard, Elyane Célis, Léo Marjane, Django Reinhardt et le Hot Club de France, Edith Piaf (1943), Lucienne Boyer, Réda Caire, Charles Trenet, Georges Ulmer ou Yves Montand (1944).
Les artistes qui se produisent aux Folies durant cette période eurent  quelques problèmes à la libération. Georgius par exemple eut un an d'interdiction de scène (6).

 Line Renaud en 1945, les Frères Jacques en 1947, seront parmi les derniers artistes à s'y produire.
folies belleville salle Folies belleville programme
La salle dans quai des Orfèvres en 1947 Comme tous les music-halls de l'époque les folies avait un promenoir ( il existait encore à la Cigale quand celle ci était un cinéma dans les années 90)

Le cinéma

Folies Belleville 1950
La rue de Belleville dans les années 50 
Le cinéma et le bar 
Après  1950 la salle se transforme en cinéma: 950 places avec un balcon.
Il fermera un peu après 1975.
Aujourd'hui c'est un super marché Dia à coté de "Tang gourmet" et du bar "Aux Folies". La maison qui fait l'angle de la rue Dénoyez est du début du XIXème siècle et est typique des maisons du village de Belleville.
La rue Dénoyez est le lieu de prédilection des graffeurs.

Notes

  1. jusqu'au Cours la Reine par le faubourg du Temple, la place du Château d'eau ( la République), puis les boulevards
  2. Organisé par l'association des travailleurs égalitaires (R Dézamy et  J J Pillot), le Manifeste n'est que de 1848 il s'agit de "néo-babouvistes" (William Louis, le premier banquet communiste, 1840)
  3. Les Dénoyez devinrent des notables importants, l'un d'eux fut maire de Belleville et décida de la construction de la nouvelle église St Jean Baptiste (son effigie est visible sur un cul de lampe de la première chapelle du collatéral). La famille   repose au cimetière du Télégraphe (à droite de l'allée centrale au début de la division II)
  4. Contrairement aux Desnoyez, Favier refusa que l'on tint des réunions politiques dans son bal sous le second Empire, mais il devint club Favier sous la Commune et on y installa le 22 ème bataillon des Fédérés des Lilas avec un véritable arsenal.. Il fut ensuite Palais du Travail, lieu de nombreux rassemblements, puis cinéma le Floréal jusqu'aux années 70.
  5. C'est le théâtre de Belleville situé cour Lesage.
  6. Le répertoire de Georgius (Au lycée papillon, Ca c'est de la bagnole) est émaillé  de jeux de mots. Que pouvait bien comprendre des soldats allemands ? 

Sites et références 

3 commentaires:

  1. Désolé, fausse manip, ce commentaire devrait être pour le mur des fermiers généraux...

    Bonjour,

    En cours d'un travail de modélisation de l'oeuvre de C.N.LEDOUX et donc, entre autre, des barrières de Paris, j'ai trouvé sur votre blog deux reproductions de la barrière du combat.
    Celle en couleur est de Palaiseau, mais je n'arrive pas à identifier la deuxième, en noir et blanc.
    En connaissez-vous l'auteur?
    Si oui, je vous remercie par avance d'avoir l'amabilité de m'en faire part.
    J'en profite pour vous féliciter pour la qualité de votre blog.
    Cordiales salutations,

    Patrice ELMER
    p.elmer@wanadoo.fr
    https://www.youtube.com/edit?o=U&video_id=4Qp_ZCs-VyE

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  2. Les Éclopés, 1876

    Le Pays du 17 Septembre 1876. Avant-hier, le Théâtre des Folies-Belleville avait convoqué la presse pour assister à la première représentation d'une comédie en quatre actes, intitulée Les Eclopès. La pièce n'est pas sans intérêt, bien que l'intrigue soit un peu obscure et que les personnages soient indécis. L'auteur, M. Damien, parait mieux réussir dans le vaudeville, à en juger par l'Affaire Ducornard, lever de rideau fort gai, qu'il a également signé.

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    1. A la première lecture j'ai pensé que ce commentaire n'était qu'une blague. En consultant le numéro du 17 septembre 1876 de "Le pays" (journal des volontés de la France) j'ai constaté que c'était l'exact contenu d'un entrefilet de la chronique "théâtres".

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