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mercredi 9 janvier 2013

Anarchistes, syndicalistes, brigadistes et communistes aux Buttes Chaumont

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Anarchistes 

La bande à Bonnot,
la "bande en automobiles"
Connaîtra une fin tragique
 à la suite du siège de sa cachette
de Choisy le Roi en  Avril 1912
Le 24  rue Fessart était le siège du journal l'anarchie. En 1911 on y arrêta Victor Serge.

"Soixante policiers, armés des pieds à la  tête, firent irruption, rue Fessart, dans l'appartement qu'occupait le journal. Le siège de cette citadelle fut aisé. La clef, en effet, était sur la porte, et, dans la première pièce qui servait de salle à manger, la police tomba sur quelques camarades  qui, paisiblement, dégustaient leur chocolat. La maison fut bouleversée de fond en comble. On chercha dans tous les coins, on remua tous les meubles. Cela, depuis six heures du matin jusqu'à midi. Beautés des perquisitions Mais nulle trace des bandits. Furieux, les policiers, plutôt que de rentrer bredouilles, emmenèrent tous ceux qui se trouvaient là. Le lendemain, onze des personnes arrêtées étaient relâchées. On ne conserva que Mlle Rirette Maitrejean, une petite femme souriante et espiègle, Claudine anarchiste, et son ami Kibalchiche, dit le Rétif..."

Victor Serge, de son vrai nom Victor Kibalchiche, était ouvrier typographe puis directeur de l'anarchie. Le siège du journal (et domicile de Victor Serge et de sa compagne Rirette MaitreJean) est fréquenté par Bonnot  qui va y rencontrer ceux qui vont devenir membres de sa bande: Garnier et Callemin
Après le braquage de la société Générale, Garnier et Callemin se réfugient brièvement rue Fessart.  Bien que totalement étranger à l'action de la bande, Victor Serge est condamné à 5 ans de prison. Devenu communiste il arrivera à Moscou en 1919 et sera le rédacteur de l'international communiste. Il s'opposera ensuite à Staline, sans être Trotskiste pour autant, condamné à trois ans de déportation il fut libéré grâce à une campagne de presse internationale et mourut au Mexique.


Dans les années 30, le 69 rue Fessart devint le premier local du "musée du soir", bibliothèque et centre culturel anarcho-syndicaliste. On y croisait Henri Poulaille, Cresson, Lacaze, ..  

 Dans le préau des écoles de la rue Fessart se tenait les réunions publiques  à chaque élection.



Les meetings de la Butte du chapeau rouge 

tableau du musée Jean Jaurès de Castres
En 1913 la commémoration de la commune au mur de fédérés est interdite. Elle se transforme en meeting contre la loi de 3 ans ( de service militaire) le 25 Mai.
150 000 personnes répondent à l'appel de la CGT et du PS. Chaque section se range quasi militairement sur les glacis des fortifs.
Renaudel, le Dr Brustlein (Suisse), Groussier, Toulouse   ( du syndicat des chemins de fer) puis  
Jaurès prirent la parole mais il est douteux qu'ils furent entendus de tous. Les discours mélangent l'hommage aux morts de la commune et les attaques de la politique militariste. La manifestation s'organise ensuite en "tribunes" séparées afin de palier à l'absence de sonorisation. La tribune 6 est tenue par Jaurès.

Ce n'était pas le premier meeting sur la butte,  une première manifestation contre les dangers de la guerre avait été organisée le 17 novembre 1912, à l’appel de la Fédération socialiste de la Seine. Le terrain est privé et hors les murs,  aussi la préfecture ne peut interdire les rassemblements. D'autres meetings se dérouleront sur la butte, d'abord  le 14 Juillet 1914, puis après la guerre pour le 1er Mai et en 1927 pour la défense de Sacco et Vanzetti.


La une de l'humanité le lendemain. Louis Barthou est alors président du conseil 

Le secours rouge international

Dimitrov sera acquitté, tenant en échec Göring et Goebbels  ce qui lui vaudra une énorme réputation.
Torgler était le dernier chef du PC, il collaborera avec les nazis. Thälmann mourra à Buchenwald.
Popov et Tanev furent aussi acquittés. Popov connut 17 ans de goulag, Tanev fut tué en Bulgarie en 1941
En 1920 la place du colonel Fabien s'appelait encore Place du Combat en souvenir des combats d'animaux qui s'y déroulaient sous la restauration. A l'angle de l'avenue  Mathurin Moreau et de la place se trouvait la maison des syndicats dont l"histoire est racontée dans un autre article.

Dans son enceinte des baraquements abriteront  des organisations communistes

Le secours rouge international (SRI) avait été fondée en 1922, c'était "l'organisation internationale du prolétariat en lutte" organisant des collectes pour soutenir les grèves, accueillir les enfants des grévistes ... Le premier président fut Julian Marchlewski , puis Clara Zetkin   de 1925 à 1933 
En 1926 ce sera la campagne en faveur de Sacco et Vanzetti, finalement exécutés en 1927. 
En 1933 ce sera le soutien à Dimitrov accusé de complicité dans l'incendie du Reichstag. 
En 1934 c'est l'aide aux soviets des mineurs Asturiens, prémisses de la guerre d'Espagne puisque c'est le général Franco, alors encore au service du gouvernement républicain , qui écrasera la rébellion.

Les brigadistes de la place du Combat


Thorez et Marty (au centre) à la prison de la santé en 1929
Cette photo figure dans les éditions de "fils du peuple"  (biographie officielle de Maurice Thorez)  de 1937 et de 1949 mais est supprimée dans celle de 1960.
Dès l'édition de 1949 on avait fait disparaître Marcel Gitton  de  la photo de la visite du bureau politique à l'exposition de 1937 (celui ci avait quitté le parti à la suite du pacte germano-soviètique)
Le bataillon "Commune de Paris" s'illustra lors de la bataille de Madrid  en Novembre 36.
Durant la guerre d'Espagne la maison des syndicats accueille "le point de ralliement, d'accueil et de transit des volontaires, ouvriers, intellectuels, paysans, employés, médecins instituteurs, venus d'Allemagne, de Grèce, de Cuba, du Canada, de l'Union soviétique et de la Tchécoslovaquie d'alors, de Pologne et de Suède qui constituèrent les Brigades internationales".
Il s'agissait de baraquements, dans l'enceinte des locaux de la "maison des syndicats", dans lesquels passèrent des milliers d'hommes des brigades internationales.

Maurice Thorez convainquit Staline de créer ces brigades, le bureau de recrutement fut dirigé par le polonais Karol "Walter" Świerczewski, le futur maréchal Tito s'occupant des recrues de l’Europe orientale.

Il y eu 35000 brigadistes dont 9000 Français.(1)

Les étrangers ne passaient généralement que quelques heures à Paris et pouvaient échapper à tout contrôle. Cependant, très rapidement  les mouvements des brigadistes  furent surveillés, en particulier aux abords des gares, par les services de la Sûreté car la loi du 21 janvier 1937 interdisait à tout Français de prendre du service dans les forces armées en Espagne, elle était également applicable à tout étranger vivant sur le sol français et le transit de volontaires en provenance d'autres pays était  prohibé.

Le colonel Fabien, Pierre Georges de son vrai nom, s'engagea dans les brigades à 17 ans ( en mentant sur son age). Il fut tué en 1944 lors de la campagne d'Alsace. La place du Combat porte aujourd'hui son nom. 
André Marty  fut "l'inspecteur général" des brigades, Stalinien pur et dur il fit la chasse aux trotskystes et aux anarchistes. Il fut exclu du parti en 1952 avec Charles Tillon; cet épisode, qui fait écho aux grands procès dans les pays de l'Est, semble n'avoir eu pour base que l'inimitié entre Thorez et Marty.
Le bataillon "commune de Paris" s'illustra lors de la défense de Madrid, il compta parmi ses membres celui qui allait devenir le colonel Rol-Tanguy.

Après la dissolution des Brigades internationales en 1938, beaucoup rentrèrent chez eux. D'autres, interdits de territoire, furent internés dans les camps du sud de la France.

Quand la France rentrera à son tour en guerre, l'opinion  majoritaire sur l'Espagne sera bien résumée par le livre d'André Corthis: L'Espagne de la victoire. L'auteur était très connue, prix Femina, elle y décrit son voyage en  Espagne, en 1939 durant la "drôle de guerre", sous forme d'une ode à la gloire du franquisme. On y apprend toutes les exactions des républicains (dont le bombardement de Guernica !) , le martyr de Primo de Rivera, on découvre les oeuvres sociales franquistes et le fait que la suppression du suffrage universel est plus que justifié dans une Espagne analphabète.
A L'Ouest les brigadistes furent au mieux méprisés ou traités de suspects comme "premature antifascists" . A l'Est ils furent utilisés par les propagandes nationales mais on connait le sort de London (l'aveu).

La guerre d’Espagne devint dans "l'après guerre"  quelque chose de romantique à cause de la qualité des romans-témoignages qui en traitaient: l'espoir, pour qui sonne le glas, le testament Espagnol, pour l'honneur de la Catalogne... Les brigadistes n'ont vraiment droit à la reconnaissance qu'aujourd'hui: une reconnaissance posthume. Celle ci ne veut retenir que le coté idéaliste de leur combat en gommant toutes les zones d'ombre, toutes leurs désillusions.(2)
Je pense que tout ceux qui ont lu le témoignage  de Stein (Ma guerre d'Espagne) ont ressenti un profond malaise, hésitant entre taxer l'auteur d'exagération  et le sentiment que le chemin de la dictature est pavé de bonnes intentions.


1) Le nombre des brigadistes français est très discuté avec une estimation  maximum de 25000 suivant le Figaro de l'époque. Le chiffre de 9000 est l'estimation de Delperrie de Bayac qui écrira un livre de référence.
Notons qu'à droite 500 français feront partie du "tercio" Jeanne d'Arc.
2) Il me semble qu'il en est de même, dans une moindre mesure, pour la (faible) résistance française. 

Sites et références

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