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mercredi 9 janvier 2013

La semaine sanglante de la Commune de Paris aux Buttes Chaumont

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Les Buttes Chaumont et le Père Lachaise furent les derniers points de résistance de la Commune commandés depuis la mairie du XX éme (qui était alors en face de l'église St Jean Baptiste), puis de la rue Haxo (*) . Les Versaillais bombardaient les Buttes  grâce aux  canons de Montmartre.

Je vous propose de suivre les évènements de la semaine sanglante du 22 au 28 Mai 1871 avec deux livres  du tout début du XXeme siècle:  celui du socialiste Lissagaray, puis celui des très réactionnaires Paul et Victor Marguerite

*) bien que dans le XX eme, je suivrais les communards jusque là.

La mairie du XXéme , ex mairie de Belleville,
ex cabaret de l'ile d'amour
Située en face de l'église St Jean Baptiste
Plusieurs bataillons Versaillais, parvenus par la route stratégique à la rue de Crimée, sont arrêtés rue de Bellevue. De la place du Marché, trois canons unissent leur feu à celui de la place des Fêtes pour protéger les buttes Chaumont. Cinq artilleurs seulement servirent ces pièces toute la journée, n'ayant besoin ni d'ordre ni de chef. A quatre heures, les canons des buttes se taisent faute de munitions; leurs servants vont rejoindre les tirailleurs des rues Meynadier, Fessart et des Annelets.

"Le sol était jonché de leurs cadavres" télégraphia Thiers à ses préfets; "ce spectacle affreux servira de leçon" ..
trois cents qui avaient été jetés dans le lac des Buttes Chaumont étaient remontées à la surface et ballonnés promenaient leurs effluves mortelles... Aux Buttes Chaumont  on dressa un bûcher colossal inondé de pétrole et pendant des journées une fumée épaisse, nauséabonde, empanacha les massifs

 Toutes les puissances sociales applaudirent M Thiers entreprenant de soulever le monde contre ce peuple qui après deux mois de règne souverain et le massacre de milliers des siens avait sacrifié 63 otages ... Le chef de la police militaire avoua 17000 fusillés.

Paul et Victor  Marguerite ont une tout autre vision des évènements et parlent surtout du massacre des otages de la rue Haxo  

Tandis que se poursuivaient autour des Buttes-Chaumont, du Père-Lachaise et de Belleville, réduit suprême, les préparatifs de la grande manœuvre du lendemain, les derniers débris des bataillons de la Commune avaient reflué autour de la mairie du XX ou se distribuaient, dans un affolement, les bons de vivres, les logements. Chevaux, voitures s'amassaient, se bousculaient autour de l'église; l'état-major, les diflérents services, les rares survivants ou présents de la Commune et du Comité central s'étaient établis rue Haxo dans les maisonnettes et les terrains vagues de là cité Vincennes. Ranvier, seul membre du Salut public qui figurât encore, se cantonnait aux Buttes-Chaumont, à ses tenaces batteries. Le reste se disputait encore l'ombre du pouvoir. Le Comité central revendiquait la dictature. Varlin lui est adjoint. C'est un chef de légion, le colonel Hippolyte Parent, qui a recueilli le dérisoire titre de délégué à la guerre. Ferré continue sa lâche.

La villa des otages était à l'origine un bal public.
L'entrée actuelle est  une porte cochère d'immeuble mais il y a toujours un jardin et une dalle commémorative.
Les pères Jésuites occupérent les lieux , il y avait là la reconstitution des 3 cellules de la prison de la Roquette des otages  jésuites.
Les cellules et le mur des otages furent détruits dans les
années 50 pour faire place à "l'habitat communautaire Haxo"
52 otages dont 11 prêtres furent exécutés. Cette photo est une "reconstitution" avec plus de 150 figurants.
L'église Notre dame des otages au 81 rue Haxo commémore l’évènement. Elle fut construite de 1933 à 1938 en remplacement de  la chapelle des jésuites de 1894.
D'autres otages furent fusillés à la Roquette dont Georges Darboy , l'archevêque de Paris. L'église St Georges de la Villette  lui sera dédiée. 
Dessinée par Robida la dernière barricade
de la rue Ramponneau le 28 Mai 1871
Lissagaray était parmi les défenseurs de cette barricade
Le fédérés furent regroupés dans la parc des Buttes Chaumont
300 fusillés dans le parc, 500 au Père Lachaise ( dont 147 au mur des fédérés),..
Manifestation au  mur des fédérés du Père Lachaise.
On fusilla ici  147 communards durant "la semaine sanglante". D'après Lissagaray 3000 communards faits prisonniers dans le cimetière  furent  exécutés à la Roquette toute proche, le total des fusillés atteignant 17000 ( on peut juger du progrès en comparant avec les chiffres du massacre de la Saint Barthélémy: 2000 morts)
C'est en 1880 qu'eut lieu la première manifestation du souvenir.
Il y aurait 600 000 personnes en 1936 défilant durant 9 heures.
En face du mur se trouve les tombes des grands noms
du socialisme
 Le président de la cour martiale, Gois, s'est rendu à la Roquette, portant l'ordre de se faire remettre, avec quatre otages désignés « mouchards de l'empire », tout ce que l'escorte pourrait emmener. Trente-trois gendarmes, trois jésuites, huit autres prêtres ou séminaristes tirés de leurs cellules sans qu'on leur laissât le temps d'achever de se coiffer, de se chausser, complètent le lot des victimes. On fait remonter quinze sergents de ville, crainte d'une rébellion; l'escorte des fédérés est si faible que malgré ses chasse-pots, des habitants autour de la Roquette crient aux prisonniers : « Sauvez-vous ! » Mais ceux-ci, un sous-officier en tête, marchent alignés, docilement, de leur pas militaire ; les prêtres derrière eux trottinent, gênés par leur robe. Rue Oberkampf, un renfort grossit le peloton ; rue de Puebla, toute une foule l'entoure : ce sont des fuyards des Buttes-Chaumont et de toutes les barricades, l'immonde écume des bas-fonds. Un cri s'élève : « A mort! voilà les otages! » Le cortège s'engouffre dans la mairie, d'où Ranvier le repousse, le rejette à la mort. Une abominable montée vers les remparts, où l'on doit les fusiller, commence sous les injures, les poings tendus. La foule hurle, chante, court en danses sauvages. Trop loin, les remparts ! Qu'on les tue ici. On les pousse au secteur, rue Haxo., dans cette cité Vincennes, tout contre la maisonnette où l'état-major réside. Parent essaie en vain de s'interposer, appelle à l'aide Fortuné Piat, du Comité, Varlin; ils montent sur le petit mur de l'enclos, agitent leurs écharpes, supplient, s'égosillent. Les forcenés les insultent, les menacent de mort.
D'une poussée irrésistible les otages sont précipités dans l'enclos, la boucherie commence. On abat sur place ; on se divertit à faire franchir aux malheureux un petit mur pour les tirer au vol. Tous, sauf un, furent braves. Un des gendarmes, se retournant vers les meurtriers, salue : « Messieurs! vive l'Empereur! » Un prêtre dit : « Il ne me convient pas de mourir en faisant des cabrioles ». La confusion était telle qu'un fédéré fut tué en voulant faire sauter le dernier. Sur la litière des corps où beaucoup seulement blessés gémissaient, on piétina, des salves furent déchargées, des baïonnettes piquaient au tas. Les assassins avaient chaud. Hommes et femmes on alla boire. Quand on tira les corps, le 29, de la fosse d'aisance où on les avait entassés, on vit que l'un des cadavres avait reçu soixante-neuf balles, un père jésuite soixante-douze coups de baïonnette...
 Le 27, dès l'aube, sous le visqueux brouillard, pendant que Clinchant et Douay restaient en place barraient tout passage, l'armée s'ébranlait aux ailes pour refermer, derrière l'émeute, les tenailles de fer, écraser sous la pression définitive la résistance en miettes. Ordre à Ladmirault qui, la veille, s'était emparé de la rotonde de la Villette, des abattoirs généraux, touchait au canal de l'Ourcq, ordre à Vinoy de s'étendre par leur gauche et leur droite le long des remparts, jusqu'à ce qu'ils se soient donné la main, maîtres des hauteurs de la route stratégique. Alors, par une conversion simultanée, ensemble on foncera sur les Buttes- Chaumont, le Père-Lachaise, on rabattra vers Clinchant et Douay le reste des bandes. Il était six heures du soir, quand, après une inces- sante canonnade, un mouvant corps à corps d'escarmouches qui immobilisait dans Belleville une division, les clairons de Ladmirault, devant les Buttes, sonnaient la charge, élançaient trois brigades à l'assaut. Le drapeau dans le jour tombant, un triste crépuscule pluvieux, flotte au sommet. A peine quelques fédérés s'échappent, abandonnent l'amas des canons, des munitions; déjà les fusillades commencent, frappent, près des carrières d'Amérique, ceux qui s'y étaient réfugiés. Vinoy n'avait pu avancer qu'avec d'extrêmes difficultés, gêné par le feu qui, de la mairie du XIe, balayait la place du Trône, ses réserves. La Mariouse suit les fortifications. La brigade de Seigneurens, par la rue de Puebla, monte vers le Père-Lachaise. C'était l'heure où, rue Haxo, les chefs, la faible tête achevait de se décomposer. Ils sont neuf ou dix qui discutent toujours : Varlin, Ranvier, Trinquet veulent qu'on se batte encore. Allix le fol, sorti on ne sait d'où, venu on ne sait comment, pérore, rayonnant : il n'y a qu'à descendre dans les quartiers vides... On reprendra Paris d'une légère poussée... Le délégué à la guerre, Parent, a profité du voisinage de la porte de Romainville, où se tassent deux ou trois milliers d'habitants de Belleville, pour filer derrière des franc-maçons qui ont fait baisser le pont-levis, vont demander aux avant-postes bavarois passage sur la zone neutre pour ces non-combattants. Les gendarmes de Romainville repoussent dans la souricière la masse geignante, sur laquelle une sentinelle ennemie fait feu. Parent est évincé, aussi Arnold que les Allemands promènent, bête curieuse, de poste en poste, et qu'ils renvoient, sans avoir voulu prendre sa lettre pour l'ambassadeur américain. Ferré, qui ne pense qu'aux otages, s'est rendu en personne à la Grande-Roquette; mais là, trop avertis du sort qui les attend, les trois cent quinze otages qui restent, une centaine de détenus criminels, se sont mutinés, enfermés dans leurs sections ; Ferré se rabat sur les treize cents soldats de la Petite-Roquette, les abandonnés du 18 mars. En trois détachements, salués à leur sortie par les boutiquiers d'un sympathique cri de : Vive la ligne ! — cri répété sur tout le parcours (on les prend maintenant pour des Versaillais tournés au peuple) — ils sont menés à Belleville, enfermés dans l'église.

Le petit journal du 31 Mai écrira

Il ne restait plus aux fédérés aucun point stratégique propre à servir de base d'opérations à une défensive militairement organisée. Aussi, durant les dernières heures de cette lutte, ce n'est pas en soldats qu'ils se battent, mais en bandits désespérés qui savent qu'ils n'ont plus d'autre perspective que la mort et pour qui tous les moyens de résistance sont bons. Déjà ils auraient déposé les armes si, parmi les derniers combattants, ne figuraient tous les repris de justice, tous les  réclusionnaires libérés, et avec eux les quelques milliers d'étrangers relaps qui forment le noyau de cette troupe famélique. L'armée, de son côté,'brûle d'en finir; sans les officiers qui sagement les contiennent, les troupes se jetteraient à corps perdu sur ces derniers retranchements de la démagogie incendiaire. Mais nos généraux ont deux grands intérêts à ménager le sang généreux des soldats et les demeures déjà trop rudement éprouvées de la population inoffensive.

Sites et références

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